Joëlle de Gravelaine : une grande dame de l’astrologie

Vous allez faire ce mois-ci davantage connaissance avec Joëlle de Gravelaine. Cette grande dame de l’astrologie pouvait tout aussi bien donner des cours, des consultations,  ou des conférences que publier des articles dans les journaux, écrire des livres sur l’astrologie et la mythologie, ou encore être invitée dans les émissions de radio et de télévision qui portait sur l’astrologie.         Sans compter qu’elle était aussi directrice des collections « Réponses »  et « Réponses santé » chez l’éditeur Robert Laffont.

Lorsque Joëlle a eu l’idée de créer chez Tchou avec Madame Joanne Esner la série des grands livres noirs sur les signes du zodiaque elle a demandé à chaque auteur (qui était bien sûr du signe concerné) de raconter son parcours d’astrologue. Joëlle – native du Capricorne – a écrit le grand livre du Capricorne. Il nous est ainsi possible de savoir comment et pourquoi elle en est venue à l’astrologie.

Vous trouverez également

  • des extraits du beau livre de Joëlle La voie du Soleil.
  • le texte de l’hommage de Solange de Mailly Nesle lors du congrès Sep Hermès consacré à Neptune en 1998,
  • Le texte de l’hommage qu’à la demande d’André Barbault, j’avais écrit dans le numéro 119 de la revue l’Astrologue.
  • Les témoignages d’astrologues qui l’ont bien connu : Catherine Aubier, Martine Barbault, Evelyne Faure, Ariane Vallet.

Deux scientifiques très réservés vis-à-vis de l’astrologie avaient demandé une consultation à Joëlle pour les besoins de leur livre Peut-on penser l’astrologie : science ou voyance. Il s’agissait du psychiatre Edouard Collot et de l’astrophysicien Daniel Kunth, l’un des auteurs du Que sais je ? sur l’astrologie. Elle accepta d’interpréter leurs thèmes ; le script de ces deux interprétations figure en annexe du livre.

Quelques extraits de La Voie du Soleil

Joëlle avait la plume facile. Elle écrivait comme elle parlait. Voici quelques brefs passages tirés de « La voie du Soleil » qui expriment fort bien les idées mais aussi les sentiments qui animaient la pratique astrologique de Joëlle.

 « Avec l’astrologie, nous parlons le langage du ciel, des éléments, des dieux, avec les mots de l’homme et les images de l’homme. Et c’est pourquoi il s’agit d’abord de poésie, cette poésie que Gaston Bachelard définissait si joliment comme une « métaphysique instantanée ». Poésie complexe et multiple qui dit tous nos humains secrets, nos désirs, nos peurs, nos angoisses, notre grandeur et notre faiblesse, notre âme mystérieuse et nos besoins d’animal.

L’astrologie nous pose toutes les questions que l’homme s’est toujours posées, son regard sur la mort et sur sa liberté, son destin et la façon dont il convient de l’assumer au lieu de le fuir, si on souhaite pleinement accomplir. Si l’on veut se risquer à prédire, disons qu’il nous arrive ce que nous sommes. Rien de plus, rien de moins. Et que celui qui parvient à vivre ce qu’il est, paradoxalement, est plus libre que celui qui n’y parvient pas.

Nous savons aujourd’hui que nous sommes faits de cette même poussière dont sont constituées les étoiles et que la vieille loi de la Table d’Emeraude, le « ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas ; par ces choses se font les miracles d’une seul chose… » se trouve aujourd’hui confirmé par la science…

Cette unité sous-jacente de l’univers, nombreux sont aujourd’hui les chercheurs à la pressentir, l’affirmer ou la rechercher. Et l’astrologie, elle aussi, depuis des millénaires, proclame qu’il existe une structure et une ordonnance du monde, projection métaphysique de l’homme, antérieures à l’astronomie, qui fonctionnent avec autant de rigueur que les rouages de l’horlogerie cosmique. L’astrologie, c’est d’abord cela, et c’est pourquoi sa portée est universelle, son langage communicable à tous les peuples, dans toutes les langues. Il n’est de voir l’étrange concordance symbolique qui relie entre elles les astrologies du monde entier. Même si la chinoise diffère de la nôtre par son jeu de cycles qui tournent à l’intérieur d’autres cycles se dévidant de façon circulaire, même si l’indienne ou l’assyro-babylonienne diffèrent entre elles par des points de détail, si l’une débute son zodiaque par le Bélier – dans le monde occidental agressif et actif – et si l’autre ledébute par son signe opposé, la Balance – dans le monde oriental épris du Juste Milieu (et qui est aussi celui où l’on écrit de droite à gauche) -, partout on retrouve les douze signes, les douze heures du jour et de la nuit…

Mais l’astrologie n’est pas que le nombre. Elle est d’abord image et poésie. Et c’est par l’image, par la poésie, qu’il est possible de la rendre accessible à chacun, parce que la poésie est un langage universel.

Lorsque William Blake écrit :

Voir un monde dans un grain de sable      Et un ciel dans une fleur sauvage         Tenir l’infinité dans la paume de la main    Et l’éternité en une heure unique

chacun est apte à ressentir, à percevoir le sens des mots à travers ses propres résonances ; en chacun l’onde de choc de l’image, de la musique, suit son propre parcours, suscite des évocations diverses, mais « globalement » et pour l’essentiel, le message sera reçu par tous, entendu, enrichi de la sensibilité de chacun et, de ce fait, il n’en sera que plus juste, mieux ajusté à celui qui le reçoit.

L’astrologie, de même, propose un langage poétique qui n’est jamais banal, jamais « passe-partout », mais les images qui le tissent s’engouffrent en chacun, le touchent en ce que chacun peut et sait l’entendre. L’astrologie et le langage, pour paraphraser Lacan, sont structurés comme l’inconscient. Ce « signifiant » dont il parle pourrait bien avoir « quelque chose à être » avec le contenu du thème astral. L’astrologie renvoie à l’amateur de subtilités psychiques un étonnant écho où défilent les images parentales et leurs poids de fatalité ancestrale, les jeux de répétition et d’identification, les prises de`conscience et leur pouvoir rédempteur, libérateur. Avec, en outre, la possibilité pour l’être de s’inscrire à l’intrérieur d’un Grand Projet où il a son rôle à tenir. Non plus le théâtre Shakespearien plein de bruit et de fureur où I’homme dérivé, délire et rêve mais trajectoire cohérente qu’il importe de suivre pas à pas, religieusement. Et j’entends bien par là donner au mot « religieux » son sens absolu de lien avec un monde qui nous dépasse, dépasse notre mesure humaine, nos repères humains. L’astrologie, en effet, est religieuse dans la mesure où elle nous relie à plus grand que nous. S’agit-il de Dieu, de la Structure Absolue, de l’univers en expansion, en « respiration », de ces espaces infinis qui effrayaient Pascal ou de ce « plus de science qui nous rapproche de Dieu » selon Einstein ? Ou bien encore de cette « réalité imaginale selon Corbin qui n’est pas une réalité imaginaire mais bien une réalité réelle, à un autre degré d’être que les mondes sensibles et intelligibles ?

 

L’hommage de Solange de Mailly Nesle

Joëlle de Gravelaine nous a quittés le 25 juillet 1997. C’est pour nous tous une grande tristesse même si nous savions plus ou moins, sans vouloir y croire, que son départ était inéluctable ; nous nous sentons aujourd’hui tous un peu orphelins.

Depuis quarante ans, elle pratiquait l’astrologie non pas en tant qu’outil prédictionnel mais en tant qu’aide thérapeutique. -Grâce à ses connaissances en psychologie des profondeurs, à ses recherches en mythologie et à sa réflexion poétique, elle a constamment nourri l’interprétation des symboles astrologiques.

D’une vaste culture, elle était capable de puiser naturellement chez les grands auteurs afin de trouver une phrase, une anecdote qui fasse écho chez son lecteur ou son consultant. La poésie était pour elle une des grandes interprètes des symboles astrologiques et le poète devenait alors le chef d’orchestre de la musique des symboles. Elle aimait notamment la langue de Paul Valéry, la profondeur de Pierre Jean Jouve. Participer à un cours d’astrologie de Joëlle, c’était aussi entrer en littérature comme on entre dans un temple pour y découvrir l’âme qui l’habite.

A côté de la poésie, la mythologie était bien sûr le fil d’Ariane, le fil conducteur de l’interprétation des signes et des planètes. Dans son dernier livre « Dieux et héros du zodiaque » 1 , elle propose de nouvelles lectures de chaque signe en les associant à un florilège de mythes avec lesquels elle a découvert des correspondances. Car plutôt que de donner des formules toutes faites pour traduire les symboles zodiacaux elle préférait susciter le goût de la réflexion, de la méditation et de la recherche.

« Mettre en résonance Astrologie et Mythologie permet de développer à l’infini les rapports symboliques » disait-elle.

Ainsi ne s’adressait-elle pas qu’au mental de ses lecteurs mais à leur sensibilité, ce qu’elle savait faire avec maestria car elle possédait un véritable don pour l’écriture. Vous savez que, par ailleurs, elle assumai a direction des collections « Réponses » et  «  Réponses Santé » chez Laffont depuis plus de 25 ans, collections axées sur les sciences humaines et les problèmes de  société ou de santé.

Nous ne pouvons rendre hommage à Joëlle sans évoquer sa féconde recherche sur la Lune Noire. Elle étudia en profondeur le mythe de Lilith, première femme d’Adam et grande servante de Yahvé ce qui lui permit de renouveler l’interprétation de la Lune Noire dans un thème.

« Elle a une valeur de sacrifice et a à voir avec l’initiation au sens étymologique de passage par la mort, ce dont on ne peut faire l’économie si on veut progresser » disait-elle.

Etudiants et professionnels se pressaient pour suivre ses cours ou pour venir l’écouter lorsqu’elle animait des séminaires ou donnait des conférences, que ce fut en France ou à l’étranger, notamment en Belgique, en Espagne ou au Canada. Par sa vision poétique, créatrice et novatrice, l’astrologie française a acquis un grand rayonnement. Joëlle parlait espagnol et   pouvait donc spontanément faire une conférence dans la langue ibère. Vous savez qu’elle s’intéressait aussi à l’astrologie aztèque. Elle y avait trouvé des correspondances symboliques qui, pour elle, enrichissait notre astrologie.

Loin de déterminer l’avenir, les symboles astrologiques étaient d’abord pour elle la voie royale de la quête du sens en consultation, le sens de l’image était alors primordial. « C’est en proposant aux gens des images qu’on leur fait prendre conscience de leurs valeurs intérieures » disait-elle.

Consciente du danger des paroles que peut transmettre l’astrologue, de leur influence et des conséquences qu’elles peuvent avoir sur le psychisme du consultant, Joëlle de Gravelaine cherchait toujours à traduire la symbolique d’un thème de façon poétique afin que les gens soient « libres de réagir et surtout d’une façon émotionnelle », disait-elle encore.

Son souhait le plus cher était de donner des clefs à ceux qui venaient la consulter afin qu’ils acquièrent « une meilleure prise sur leur réalité intérieure ». L’astrologie que pratiquait Joëlle de Gravelaine était une véritable voie d’initiation à soi-même.

Toute l’équipe d’Agapè et moi-même nous sentions proches de Joëlle car nous avons à coeur de diffuser une astrologie de qualité, une astrologie qui élève l’esprit et permette à l’âme d’advenir plutôt que de l’enfermer dans un destin inexorable.

Joëlle a toujours soutenu Agapè moralement, avec coeur et physiquement. Je savais que je pouvais toujours avoir recours à son aide : elle était partie prenante de notre projet. C’était une femme de coeur et de loyauté.

En l’évoquant j’entends, comme tous ceux qui l’ont connue, sa voix. Sa voix, reflet ou sonorité de l’âme, restera pour nous tous l’une des formes ou des traces les plus vivantes qu’elle ait gravé dans nos coeurs. Si douce et si vibrante à la fois, mêlée d’une tristesse gaie et d’une gravité chaleureuse, la voix de Joëlle retentit encore à mes oreilles.

Cette voix qui longtemps animera nos souvenirs lui a pourtant joué drôles de tours ! Alors qu’elle s’apprêtait à faire une conférence ou à animer un séminaire, combien de fois ses cordes vocales ne voulurent rien entendre à ses injonctions.  Il nous fallait alors l’ouïe bien fine pour écouter ses propos. Mais son charme, son intelligence, la profondeur de ses pensées suffisaient pour retenir notre attention et nous convaincre.

En d’autres occasions sa voix inventa encore des facéties. Je me souviens de cette aventure qu’elle racontait avec tant de drôlerie : lors d’une conférence ses propos avaient tant hypnotisé ses auditeurs qu’ils s’étaient endormis.  « J’ai alors pu quitter la salle sur la pointe des pieds, dit-elle malicieusement, sans qu’ils s’en aperçoivent. Je me demande vraiment ce que je leur fais» ?

Je me souviens aussi d’un voyage fait ensemble en train. Elle m’avait donné rendez-vous dix minutes avant le départ à la tête du train. J’étais arrivée en retard et dans ma précipitation j’avais confondu la tête et la queue du train. Je me dis qu’elle avait dû monter dans la rame mais, ne la voyant pas, je me mis à arpenter les wagons ; sans succès. Au paroxysme de l’inquiétude, me demandant si je devais descendre ou rester, je la vis alors une minute avant le coup de sifflet fatal monter très tranquillement dans le train.

Elle m’apprit qu’elle était arrivée une demi-heure heure à l’avance et n’avait pas bougé d’un pouce à côté de la tête du train pendant que moi j’avais fait le parcours du combattant. Ainsi avions-nous pu, hilares, comparer les différences de comportement entre un Bélier et un Capricorne.

Elle m’avait d’ailleurs dit «je dois être la réincarnation d’un chef de gare », ce qui lui semblait être une approche symbolique fort intéressante du Capricorne qu’elle était.

Aujourd’hui c’est son humour et surtout le souvenir de fous-rires partagés qui viennent en contrepoint pour adoucir la tristesse de son absence.

Solange de Mailly Nesle

https://agape-france.com

L’hommage d’Yves Lenoble

Joëlle de Gravelaine, née le 12 janvier 1929 à 4 h 40 à La Celle Saint Cloud, nous a quittés le 26 juillet 1997.

Joëlle : une voix, un sourire. Une voix de contre-alto qui évoque le son du violoncelle. Un sourire plein de tendresse qui laisse parfois percer la tristesse d’une orpheline.

Joëlle raconte dans «Le grand livre du Capricorne » (Editions Tchou, 1980) qu’obligée, très jeune, de gagner sa vie, elle travaille comme secrétaire d’un astrologue passionné d’astrologie médicale. Au départ elle est sceptique vis à vis de l’astrologie. Mais, ses week-ends lui laissant du temps libre, elle teste l’astrologie à partir des thèmes qu’elle a sous la main. Elle se rend vite compte de la réalité des corrélations entre les maladies et le thème astral et se passionne pour l’astrologie, tout particulièrement pour l’astrologie médicale.

C’est la rencontre de Jean Carteret, son maître en astrologie, qui lui révèle la dimension poétique de l’astrologie. Elle découvre à son contact les liens entre la mythologie et l’astrologie, s’intéressant tout particulièrement à la mythologie de la Lune noire. Elle écrira en 1985, aux Editions de l’Espace Bleu, « Le retour de Lilith » (la Lune Noire), le livre de référence sur ce sujet.

A la quarantaine cette uranienne crée chez Robert Laffont les collections « Réponses » et « Réponses/Santé », collections essentiellement axées sur les problèmes de couple, d’éducation, de société ou de santé. Les nombreux ouvrages publiés dans ces deux collections ont contribué à informer sur ces problèmes un très large public.

Joëlle qui comptait beaucoup d’amis parmi les journalistes, les écrivains, les médecins, les psychanalystes avait le don de faire connaître une astrologie de qualité. Elle participa souvent

à des émissions de radio et de télévision et rédigea de nombreux articles dans les journaux les plus divers (Elle, Studio, etc). Elle écrivit en 1984 tout un numéro spécial d’une trentaine de pages sur l’astrologie médicale dans la revue «Tempo Médical » (N°169 de Juillet 1984). Un document indispensable aux amateurs d’astrologie médicale.

Outre ses multiples articles et études, elle a publié une dizaine d’ouvrages consacrés au prophétisme, à l’astrologie mais aussi à des problèmes psychologiques tels que ceux posés par l’adoption. Concernant l’astrologie, on notera « Malgré Jupiter » (Robert Laffont, 1964) et « L’Astrologie» (Editions spéciales – Lattès, 1969) livres écrits avec Jacqueline Aimé. Elle signe seule « Connaissez-vous selon votre signe astral » (J.Grancher, 1972) et «La voie du Soleil» (Robert Laffont, 1984). Elle écrit avec le Dr Karsenti « Réflexions sur les Maisons astrologiques : pour sortir des sentiers battus » (L’Espace Bleu, 1992).

Elle compte parmi les membres fondateurs d’Agapè, où elle donne aussi bien des cours sur l’interprétation que des cours sur l’astrologie médicale ou la Lune noire. Joëlle, conteuse remarquable, subjuguait son auditoire par son humour et sa prodigieuse culture. Elle y fit deux séries de conférences, l’une sur les thèmes de grands poètes, l’autre sur la mythologie de chacun des douze signes. On retrouve la teneur de cette seconde série de conférences dans son dernier ouvrage « Dieux et héros du zodiaque » (Robert Laffont, 1996).Auparavant elle avait écrit en 1993 «La déesse sauvage» (Dangles) un livre consacré à la mythologie qui obtint le Pélican d’or.

Cette passionnée de l’interprétation qui maniait avec dextérité la technique des degrés monomères fut l’une des intervenantes les plus appréciées des congrès de l’ARRC. Elle y donna en 1993 une conférence magistrale sur la Lune noire.

                Hommage paru dans le N°119 de la revue l’Astrologue

Une voix de contre-alto

Joëlle de Gravelaine a été présente aux congrès de l’ARRC dès l’origine. Vous pouvez retrouver sa voix de contre-alto  dans la conférence qu’elle a donné à la Porte Maillot en 1994 sur la mythologie de Jupiter.

https://yveslenoble.fr/joelle-de-gravelaine-la-mythologie-de-jupiter/

Le témoignage de Catherine Aubier

Je connaissais son nom, j’avais lu ses livres. A cette époque où les femmes commençaient seulement à se faire une place dans l’astrologie, cela m’impressionnait d’autant plus que j’étais sensible à son évidente culture et à son style.

La première fois où je l’ai vue, (cela devait être autour de 1975) c’était… chez le coiffeur. Comme elle, j’habitais rue de la Pompe. Et j’allais dans un petit salon rue Nicolo. Un jour où je me faisais couper les cheveux, je vis entrer une femme grande, élégante (elle avait beaucoup de classe) et plutôt réservée. Le coiffeur s’écria « bonjour Madame de Gravelaine » ! » et je suis restée figée. Un instant j’ai envisagé d’aller lui parler, lui dire que j’étais passionnée d’astrologie, mais débutante. Je n’ai pas osé.

Bien plus tard, quand nous nous sommes rencontrées au temps de « l’Espace Bleu » je me suis dit que j’avais été bien sotte car en réalité Joëlle était quelqu’un de très abordable, et surtout d’une grande politesse. Et quand je lui ai raconté cette anecdote du coiffeur… elle a bien ri et m’a dit « tu étais cruche, tout de même ! »

Joëlle était une « Grande Dame » mais elle était drôle. Elle avait cette sorte d’humour à froid et cette  façon d’ironiser sur elle-même typiques du Capricorne.  Je la revois nous dire, avant une conférence « je vous parie que je les endors tous en dix minutes ». Elle s’est mise à parler d’un ton monocorde et petit à petit on a vu des têtes commencer à dodeliner… Elle les a réveillés d’un éclat de rire.

Je me souviens aussi d’un jour où nous avions rendez-vous, avec Martine Barbault, Solange de Maily Nesle. C’était une période où il y avait un gros amas planétaire en Capricorne qui transitait son Soleil. Et elle, si ponctuelle d’habitude, n’arrivait pas. Nous étions malades d’inquiétude ! Je ne sais plus trop comment nous l’avons retrouvée, elle s’était trompée d’endroit sans doute… Mais en revanche je me souviens de ses paroles « Moi qui suis un Capricorne stupide, j’attends où on m’a dit d’attendre » !

Evelyne Faure l’avait baptisée « Jojo de Gravemuche ». Cette époque des réunions à « L’Espace Bleu » était magique, pour faire mentir les bruits qui disent  parfois que les astrologues s’entendent mal entre eux, nous c’est-à dire Solange (Soso Mayonnaise), Martine, Samuel « L’os à moelle » et moi nous entendions fort bien et le public appréciait les séances de « travail en aveugle où nous interprétions tour à tour un thème sans voir de qui il s’agissait, pour être ensuite confrontés à la personne en chair et en os. C’était très formateur.

Et puis Joëlle a eu un cancer. Je l’ai revue, amenuisée, avec ses cheveux qui commençaient tout juste à repousser. Elle allait mieux, mais a décidé de prendre sa retraite. Et un jour elle m’a téléphoné et dit « Catherine, je te propose mon héritage, l’acceptes-tu ? tu es la seule à pouvoir le faire ».

Je ne comprenais pas de quel héritage il s’agissait ! et c’est ce jour-là que j’ai appris que Joëlle écrivait des horoscopes pour plusieurs journaux. Ainsi j’ai « hérité » de Cosmopolitan  (je n’y suis restée que deux ans, l’ambiance était assez désagréable) et Télé Z, où je suis encore. C’était il y a vingt-cinq ans… Et ces rubriques, arrivant à une  période de ma vie où j’avais envie de prendre du champ par rapport aux cours, consultations, etc… m’ont offert un moment de paix matérielle propice à la réflexion.

Et puis quelques temps plus tard elle m’a appris que son cancer récidivait. « J’ai envisagé d’arrêter tout traitement, dit-elle, mais finalement je me suis dit que je voulais voir encore grandir ma petite fille ». Alors elle a repris la chimio.

Quand j’ai appris sa mort, c’était en plein été, je m’étais engagée à animer un séminaire en Corse pile au moment des obsèques. Alors, avant de prendre mon avion, je suis allée la voir au funérarium. Je suis resté une heure assise à côté d’elle. Elle portait un corsage couleur corail et reposait paisiblement. C’est là que je lui ai dit au revoir.

Elle fait partie de ces personnes qui marquent, en tant qu’astrologue certes, mais surtout en tant qu’être humain. Personnellement, je ne l’oublierai jamais.

Catherine Aubier

https://maison9.org/

Le témoignage de Martine Barbault

J’ai rencontré Joëlle dans les années 90.  A cette époque Evelyne Faure, directrice de la librairie L’espace bleu, m’a proposé de l’accompagner en participant à des « cours-conférences » hebdomadaires en duo. Nous devions étudier de concert le thème d’une personnalité du show-biz. Joëlle avait rencontré au préalable, ladite personnalité, afin d’étudier son thème en direct, puis nous devions ensuite le décrypter à deux face à un public de passionnés d’astrologie…

J’étais évidemment très impressionnée car alors, Joëlle était une sommité au sein du monde astrologique. Je l’avais écoutée maintes fois dans ses conférences où elle tenait en haleine son auditoire, avec une voix magnifique qui ne manquait pas de nous envoûter.

Ce qui m’interpella en premier lieu chez Joëlle, c’est sa grande simplicité, son authenticité, qui contrastaient avec l’idée que l’on pouvait se faire de cette grande dame de l’astrologie.

Très vite notre duo fonctionna comme par enchantement, comme si nous nous nous connaissions depuis longtemps. Il est vrai que nous partagions de nombreuses similitudes astrales avec un même Saturne à l’AS, son Soleil en Capricorne au même degré que Mercure, mon maître d’AS, sa conjonction Lune-Mercure en Verseau superposée sur ma conjonction Soleil-Vénus et une semblable opposition Soleil-Pluton…

Ce fut immédiatement une connivence, une complicité et surtout une complémentarité ce qui s’avérait très intéressant pour notre public, ravi de nos approches différentes et complémentaires.

J’ai été néanmoins déstabilisée par sa manière de « rentrer dans le thème », qui était aux antipodes de ma façon, plus classique. Elle commençait toujours par la Lune Noire, qui lui parlait tout particulièrement, et en tirait immédiatement des conséquences comportementales, puis elle ne manquait pas de regarder les degrés symboliques d’Hitschler, notamment ceux du Soleil, de la Lune et de l’ascendant.

A cette époque, je ne prenais pas en compte la Lune Noire et j’ai pu, grâce à Joëlle, commencer à me familiariser avec elle. Elle utilisait la Lune Noire moyenne et, de mon côté, je traçais systématiquement les deux Lunes Noires afin de privilégier l’une ou l’autre et j’avoue que celle de Joëlle ma paraissait mieux correspondre…

Quant aux degrés symboliques, il y avait déjà à l’époque, ceux de Janduz, les degrés Sabian de Rudhyar, et ceux d’Hitschler… lesquels me laissaient quelque peu perplexe.

Puis nous nous sommes suivies au sein de l’école Agapé en tant qu’enseignantes où Joëlle fut fort appréciée, car non seulement très pédagogue, mais également proche des élèves et à leur écoute.

Dans ses ouvrages, comme dans ses conférences, Joëlle de Gravelaine a su, avec brio, faire la passerelle entre dieux de la mythologie et signes astrologiques, avec la poésie et les grandes envolées lyriques qui la caractérisaient. Avec l’humour dont elle faisait preuve et son esprit vif, curieux et ludique, elle se plaisait à dire que l’astrologue pourrait tout aussi bien énoncer qu’il est « Jason ascendant Prométhée ».

Martine Barbault

http://martinebarbault.com/

Le témoignage d’Evelyne Faure

Y.L. : Comment as-tu connu Joëlle ?

E.F. : Alors que je venais de créer rue de Seine l’Espace bleu, j’ai connu Joëlle lors du congrès « Sciences et Astrologies » qui s’est tenu au Palais des congrès de la Porte Maillot au printemps 1985.

Nous sommes vite devenues amies. Nous avons même passé des vacances ensemble. Ce que j’ai pu avoir de fous rires avec elle.

 

Elle a d’abord donné des conférences à l’Espace bleu. Puis  elle a accepté de donner des cours. Une quarantaine d’élèves y participaient. Si je me souviens bien, ses cours portaient  essentiellement sur l’interprétation  des thèmes.

 

Y.L. Peux-tu me parler de ses livres ?

J’avais une maison d’édition avec au catalogue des livres sur l’astrologie. Joëlle me demanda de publier le livre qu’elle était en train d’écrire sur la Lune noire. Ce que j’acceptais immédiatement. Ce livre Le retour de Lilith – La Lune noire  a connu un vif succès. Elle a publié un peu plus tard avec Richard Karsenti un llvre sur les Maisons qui s’intitulait  Réflexions sur les maisons ; pour sortir des sentiers battus

Y.L. Je t’interromps pour te dire le plus grand bien de ce livre. Lorsqu’à Agapè je donnais des cours aux élèves qui débutaient l’astrologie, je leur conseillais toujours – lorsque nous abordions les maisons – de lire très attentivement cet ouvrage car il donne avec des exemples à l’appui l’essentiel de ce qu’il faut savoir sur chaque maison. Mais à quelle autre occasion Joëlle intervenait à l’Espace bleu ?

E.F. : J’ai également organisé à l’Espace bleu ce que nous appelions l’interprétation d’un thème en aveugle. Cinq-six astrologues représentant des courants astrologiques différents interprétaient tour à tour le thème d’une personne présente dans la salle. Je ne donnais comme information que le sexe et les coordonnées de naissance de la personne. Tous les participants étaient curieux de savoir ce que la personne concernée diraient en fin de journée à propos de ces interprétations… Joëlle a toujours accepté de se prêter à ce genre d’exercices dans lequel elle excellait.

Je n’oublierai jamais cette amie pleine de charme et toute de générosité.

 

Le témoignage d’Ariane Vallet

J’ai rencontré Joëlle de Gravelaine lors de mes études d’astrologie à l’école Agapè où elle enseignait, au début des années 90. C’était une grande dame dans tous les sens du terme. Impressionnante par sa stature, elle invitait au respect. Débutante, je buvais ses paroles. Cette native du Capricorne, Ascendant Sagittaire, transmettait ses connaissances astrologiques avec humour et passion. Je me souviens de ses cours sur JUPITER qu’elle appelait le PDG des Dieux ! Une dénomination entrée dans les annales dont elle aurait pu aujourd’hui habiller sur mesures notre président jupitérien !

Lors de ses conférences, son art de conteuse faisait merveille. Elle savait rendre vivantes les tribulations de la calebasse des contes africains, les incantations du psalmiste biblique ou éloquents les commentaires du Zohar de la mystique juive, comme les héros de la mythologie grecque. Directrice de collection dans l’édition, elle était passée à l’écriture et nombre d’étudiants se sont nourris de son œuvre, en particulier de son livre sur la Lune Noire : Le retour de Lilith.

Derrière ses interprétations de ce point astrologique fictif mais particulièrement opérant, surtout lorsqu’il est angulaire, on décelait chez l’auteure une nature non conformiste (LUNE / MERCURE en Verseau) adossée à une solide érudition, un amour de la littérature ainsi qu’une vision parfois tragique (PLUTON oblige) et une recherche de verticalité bien saturnienne. Il ne fait pas de doute que la fréquentation des auteurs jungiens dont son ami Pierre Solié1 lui avait également ouvert des horizons sur la psyché féminine. Bref, elle fut pour moi l’une de ces personnes qui vous guide sur le chemin …

Ariane Vallet

www.arianevallet.com

L’interprétation du thème de Daniel Kunth.

Joëlle aimait donner des consultations, même à ceux qui ne croyaient pas à l’astrologie….

Rares sont les documents traitant de la consultation astrologique. Lorsque Joëlle interprète le,thème de Daniel Kunth elle aborde entre autres :

  • Sa dominante FEU e AIR
  • Son signe solaire Cancer combiné à son signe ascendant Verseau
  • Sa conjonction Lune-Lune noire au MC
  • Le carré d’Uranus à Uranus
  • La progression du Soleil sur Saturne
  • Les transits simultanés de Pluton au MC et d’Uranus à l’Ascendant

 

 

1 réflexion sur “Joëlle de Gravelaine”

  1. Augé Hélène

    Merci Yves pour ce beau dossier sur Joelle de Gravelaine et merci à ceux et celles
    qui ont envoyés leur témoignage.
    moi aussi je l ‘ai connue à agapé . Et de suite elle m’a repérée comme
    une belle lune noire or celle ci est angulaire en maison 10 !
    Joelle était une femme passionnée d »une grande simplicité et qui avait
    un grand coeur .Toutes 2 ascendant sagittaire soleil capricorne un aspect
    mars_saturne et une lune en verseau j’etais sa petite soeur astrologique
    disait elle !
    vous défendrez ma lune noire moyenne m’avait elle dit !
    une semaine avant son décès elle m’a écrit ,une lettre
    me conseillant de ne pas lâcher l’astrologie et de beaucoup travailler
    ne me disant pas qu’ elle était au plus mal ,pudeur oblige !
    Mon chagrin a été si grand quand j’ai appris son décès .
    Pour ses obsèques il y avait une grande photo d’elle que je ne cessais de regarder.
    Je pense souvent à Joelle .
    Ainsi vivons nous parmi les vivants et avec nos morts toujours vivants
    dans nos coeurs et nos pensées , nous continuons de les aimer,
    les liens demeurent !
    Hélène Augé .

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Yves Lenoble