Le symbolisme du zodiaque
Les références aux signes du zodiaque dans les textes anciens et dans les œuvres artistiques sont innombrables depuis plus de 2000 ans. Et même si, en règle générale, les milieux scientifiques et religieux considèrent l’astrologie comme inutile et dangereuse, une bonne moitié de nos contemporains continue à s’intéresser aux signes du zodiaque. Pourquoi le zodiaque fascine-t-il autant ? Quels sont ses secrets ? La pérennité de l’astrologie réside probablement dans les vertus du langage astrologique. Et celui-ci n’est-il pas avant tout un langage symbolique ?
Contrairement aux étoiles, qui restent apparemment dans le ciel au même endroit, le soleil, la lune et les planètes changent de place. Le zodiaque est la zone du ciel d’une largeur de 17° où ces corps célestes effectuent leur ronde. Leurs mouvements sur cette bande ont été divisés en 12. On insiste généralement sur les douze étapes du cycle annuel du soleil, mais cette division duodénaire concerne aussi la lune et les planètes. Cette division en douze est devenue fondamentale. Souvent utilisée on la trouve régulièrement mentionnée. Est-il besoin de rappeler les douze heures du jour, les douze fils de Jacob qui ont donné naissance aux douze tribus d’Israël, puis aux douze apôtres ? Et j’allais oublier les douze portes de la Jérusalem céleste, les douze travaux d’Hercule, et même les douze chevaliers de la table ronde du roi Arthur…Nombreux sont les auteurs grecs qui, sans être astrologues, mentionnent les signes du zodiaque. On peut citer par exemple, dans les trois siècles qui ont précédé Jésus-Christ, Aratos, Géminos, Eratosthène et Hipparque. Les archéologues n’arrêtent pas de découvrir des représentations de zodiaques, ce qui confirme à quel point jadis l’astrologie jouait un rôle important. Si on a tous entendu parler du zodiaque de Denderah (zodiaque égyptien datant du premier siècle et que l’on peut voir au Louvre), on connaît généralement moins l’existence du Zodiaque de Grand (dans les Vosges) ou du Zodiaque romain de la Tabula Bianchini, tous deux datant du deuxième siècle. Ceux qui aiment les cathédrales savent que des zodiaques y figurent sur la plupart des portails occidentaux, les plus connus étant ceux de la basilique de Vézelay ou de la cathédrale Notre Dame de Paris. Bien des enluminures, également, comportent la présence des signes du zodiaque. On a tous présent à l’esprit, par exemple, celles qui ornent les Très riches Heures du duc de Berry (XVème siècle). Et, c’est toujours le même zodiaque avec sa forme circulaire, ses sept planètes, sa subdivision en douze, chacun des douze signes portant le même nom….
Des symboles qui résonnent en nous
A dire vrai, ce n’est pas toujours l’image du signe solaire qui est proposée. Prenons un thème connu pour illustrer ce dernier point. L’écrivain Jean Giono est né sous le signe du Bélier avec pour ascendant le Taureau. Mais, comme la Lune et Vénus sont également présentes dans ce signe ascendant du Taureau, le signe le plus valorisé est dans son cas le Taureau. Ce romancier casanier, qui sut si bien rendre l’atmosphère de sa Provence natale, présentait effectivement toutes les caractéristiques du Taureau. A ce propos nous avons interprété récemment le thème d’un ami, professeur de lettres, thème marqué par une dominante Taureau. Il s’était tout à fait reconnu dans la description du Taureau et quand nous lui avons indiqué que Jean Giono était probablement l’écrivain le plus typique du Taureau, il nous a répondu que c’était son auteur préféré. En astrologie, nous rencontrons constamment de telles résonances qui ne s’expliquent que par la loi d’analogie.Les images zodiacales ont une portée universelle. Au contraire de bien des langages spécialisés comme peuvent l’être par exemple le langage du biochimiste ou celui de l’astrophysicien, le langage astrologique est un langage symbolique compréhensible par tous. L’ «ADN» (acide désoxyribonucléique) ou le «trou noir» ne sont pas des notions faciles à comprendre. En revanche, tout un chacun saisit d’emblée ce qu’est un Bélier, un Lion ou un Scorpion. C’est le propre d’un symbole d’être accessible aisément. Lorsqu’il interprète un thème, l’astrologue évoque toujours avec son consultant la symbolique du signe le plus valorisé et le consultant se sent généralement très concerné par l’image proposée, tant elle l’aide à se mieux connaître.
Les Très Riches Heures du duc de Berry. Septembre.
Outre sa dimension cosmique, le zodiaque a aussi une dimension mythologique. Le psychanalyste jungien Luigi Aurigemma a rappelé le lien existant entre le signe du Scorpion et le mythe d’Orion. Ce chasseur, à l’époque où il tuait toutes les bêtes de l’île de Chio, avait saisi la déesse Artémis par le pan de sa robe. Celle-ci, outragée, suscita immédiatement contre lui un scorpion qui le piqua mortellement. Pour ce service rendu à sa fille, Jupiter transforma le Scorpion en constellation. Il envoya aussi Orion au ciel et le plaça de telle façon qu’au lever du Scorpion le chasseur s’enfuit pour se coucher. Joëlle de Gravelaine a souligné les points communs de la symbolique des grands héros de la mythologie et de celle des douze signes du zodiaque. Ainsi l’histoire de Jason et de la toison d’or fait tout à fait penser au Bélier avec son courage, son impulsivité, son goût de l’aventure pour l’aventure. De même, la dualité du signe des Gémeaux est en résonance avec l’histoire de Castor et Pollux. Lorsque Castor est blessé à mort, Pollux n’admet pas que son frère devienne mortel. Afin que ce dernier puisse continuer de jouir de l’immortalité, Pollux propose à son père Zeus de se rendre un jour sur deux aux Enfers.
Un ensemble structuré de symboles
Il est temps de présenter l’approche métaphysique du zodiaque, tout à fait complémentaire de l’approche mythologique. Cyrille Wilczkowski était d’avis que le Zodiaque gagnait tout à fait à être envisagé comme l’ «analyse et l’histoire de la Manifestation». Le zodiaque nous touche non seulement du fait de la symbolique de chacun de ses signes, mais également du fait qu’il constitue un ensemble structuré de symboles dont les significations procèdent pour une grande part des divers rapports qu’ils entretiennent entre eux. Sa division duodénaire inclut l’existence de quatre grandes structures qui contribuent à enrichir au plus haut point le symbolisme de chaque signe.
Sa structure binaire
Le zodiaque comporte une moitié involutive (du Verseau au Cancer) qui correspond à l’incarnation de l’Esprit dans la Matière, et une moitié évolutive (du Lion au Capricorne) qui correspond à la montée de la Matière vers l’Esprit. Le signe du Scorpion appartient à l’hémisphère évolutif. Cette structure binaire nous rappelle que nous passons par différentes sphères, chacune en relation avec une planète et un signe. Avant de naître, nous avons à traverser la sphère de Saturne qui régit le signe du Verseau, puis successivement les sphères de Jupiter maître des Poissons, de Mars maître du Bélier, de Vénus maîtresse du Taureau, de Mercure maître des Gémeaux. Quand nous arrivons à la sphère de la Lune maîtresse du Cancer nous franchissons la porte des hommes et nous commençons à nous incarner. C’est alors le début de notre montée vers l’Esprit et la Lumière. Lors de ce voyage nous allons traverser les mêmes sphères, avec pour étapes successivement Mercure qui maîtrise la Vierge, Vénus la Balance, Mars le Scorpion, Jupiter le Sagittaire. Lors de la dernière étape (Saturne, maître du Capricorne) il est possible d’atteindre le sommet de notre escalade et de franchir la porte des dieux. Nos cathédrales témoignent toutes de cette structure binaire, le côté gauche exprimant la descente de l’Esprit dans la Matière et le côté droit la montée vers l’Esprit. Le zodiaque situé sur le tympan de la façade Ouest de la basilique de Vézelay illustre tout à fait cette structure binaire puisque qu’on y trouve à gauche cette moitié involutive et à droite cette moitié évolutive.
Ptolémée mentionne explicitement cette structure binaire dans son Tetrabiblos. «Le demi-cercle compris entre le Lion et le Capricorne fut dénommé Solaire et l’autre demi-cercle qui va du Verseau jusqu’au Cancer fut dénommé lunaire. De cette façon, en chaque demi-cercle un signe peut être attribué, l’un en configuration avec le Soleil et l’autre avec la Lune, à chacune des cinq planètes, selon les sphères de leurs mouvements et leurs particularités naturelles» (Livre I, Chap. 18).
Le zodiaque comporte une moitié involutive (du Verseau au Cancer)
qui correspond à l’incarnation de l’Esprit dans la Matière,
et une moitié évolutive (du Lion au Capricorne)
qui correspond à la montée de la Matière vers l’Esprit ».
Sa structure ternaire
Le zodiaque comporte également trois croix : les croix cardinale, fixe et mutable. Si les astrologues prennent, à l’heure actuelle, la croix cardinale comme origine, il n’en a pas toujours été ainsi. Pendant longtemps ce fut la croix fixe. Les textes babyloniens commencent toujours leur énumération des signes par le signe fixe du Taureau. Les langues hébraïque et arabe ont respectivement comme première lettre de leur alphabet Aleph et Alif qui précisément signifie «taureau». Le Scorpion, le Lion et le Verseau appartiennent également à la croix des signes fixes. Cette croix nous rappelle l’époque où le zodiaque avait comme repère les étoiles les plus brillantes de ces signes : Antarès pour le Scorpion, Régulus pour le Lion, Aldébaran pour le Taureau. Ces quatre signes constituent la figure du Tétramorphe que l’on retrouve à plusieurs reprises dans la littérature ancienne. Le prophète Ezechiel a vu ces quatre signes dans sa vision du trône céleste. Œdipe a affronté la sphinge : son corps est celui d’un Taureau, son poitrail celui d’un Lion, ses ailes celles d’un Aigle (souvent équivalent symbolique du Scorpion) et son visage de femme celui du Verseau. L’iconographie chrétienne, quant à elle, attribue un signe fixe à chacun des quatre évangélistes : le Taureau à Luc, le Lion à Marc, l’Aigle à Jean et le Verseau à Matthieu.
Si la croix fixe symbolisait ce qui est essentiel et permanent (et à ce titre les capacités de perspicacité et de persévérance du Scorpion sont considérables), la croix cardinale symbolisait ce qui est existentiel et éphémère. Cette croix qui démarre avec le Bélier à l’équinoxe de printemps est également composée de l’autre signe d’équinoxe, la Balance ainsi que des deux signes correspondant aux solstices, à savoir le Cancer et le Capricorne. Cette croix qui initie les changements de saison était appelée aussi la croix mobile. Si la croix fixe symbolisait ce qui est durable, la croix cardinale symbolisait ce qui évolue.
La troisième croix, celle des signes mutables, assure le lien (ou la coexistence) entre la croix fixe de la permanence (signes de milieu de saison) et la croix cardinale de l’impermanence (signes de début de saison). Ce sont les signes mercuriens (Gémeaux et Vierge) et jupitériens (Sagittaire et Poissons) qui jouent le rôle d’intermédiaire et qui témoignent de la nature composite de l’être humain. Cette croix des signes de fin de saison correspond en quelque sorte à la dimension psychique qui assure le lien entre ce qui est spirituel et ce qui est corporel.
« Les signes du zodiaque sont non seulement des images qui ont un pouvoir évocateur
mais ce sont aussi des symboles porteurs de richesses insoupçonnées.
Ces symboles manifestent à ceux qui savent les interroger
l’Unité profonde qui règne entre l’homme et le cosmos ».
Sa structure quaternaire
Le zodiaque comporte également quatre Éléments. L’ambition des philosophes présocratiques était de déterminer l’élément qui avait donné naissance aux autres éléments. Pour Héraclite c’était le Feu, pour Anaximène c’était l’Air tandis que pour Thalès c’était l’Eau. Aucun n’avait raison, mais cela donna à Anaximandre et à Empédocle l’idée du mouvement circulaire des quatre éléments, l’Eau qui engendre l’Air engendre le Feu qui engendre la Terre laquelle engendre l’Eau qui…. Ainsi, à chaque élément correspond trois signes. Les Scorpion, comme les Cancer ou les Poissons, appartiennent à l’Elément Eau. C’est le monde des émotions et les valeurs d’inspiration qui sont chez eux privilégiés. Pour les Balance, Verseau et Gémeaux l’Air l’emporte et c’est pour cette raison que le réseau relationnel compte tant pour eux. Les signes de Feu (Bélier, Lion et Sagittaire) si entreprenants, accordent à l’action un rôle prioritaire tandis que les signes de Terre (Capricorne, Taureau et Vierge) toujours sur leur garde, sont dotés d’un bon sens pratique.
Sa structure sénaire
Enfin, deux hexagones constituent la structure sénaire du zodiaque. On obtient le premier hexagone en prenant les signes de deux en deux à partir du Lion, à savoir la Balance, le Sagittaire, le Verseau, le Bélier et les Gémeaux, le second hexagone commençant au Cancer et se prolongeant avec la Vierge, le Scorpion, le Capricorne, les Poissons et le Taureau. Le premier hexagone de nature masculine développe les valeurs chaudes et extraverties (le Yang de la tradition chinoise) tandis que le second hexagone de nature féminine privilégie les valeurs humides et introverties (le Yin de la tradition chinoise).
Le zodiaque est un cercle
Si nous traduisions littéralement l’expression grecque nous devrions dire au lieu de zodiaque «cercle zodiacal». Zodiaque («zodiakos» en grec) correspond à un terme grec qui est un adjectif. Le «zodiakos kuklos» est le cercle de ce qui a trait aux figurines d’êtres animés. Ce cercle des Vivants est un symbole de Totalité au sein duquel s’articulent les quatre structures dont nous venons de parler. Chacun des douze signes résulte des incessantes interactions régnant au sein de cette totalité en perpétuel mouvement. Ainsi pour entrer dans l’univers d’un signe il faut prendre en considération, au-delà du mythe, les vertus du masculin (Chaud) ou du féminin (Humide), les caractéristiques liées aux éléments, les modalités liées au fait qu’il s’agit d’un signe de début, de milieu ou de fin de saison. Ainsi, non seulement le Scorpion est lié au mythe d’Orion, mais c’est un signe fixe, un signe féminin appartenant à l’élément Eau et ce signe est relié à la sphère de Mars.
Les signes du zodiaque sont non seulement des images qui ont un pouvoir évocateur mais ce sont aussi des symboles porteurs de richesses insoupçonnées. Ces symboles manifestent à ceux qui savent les interroger l’Unité profonde qui règne entre l’homme et le cosmos. Ils nous révèlent l’existence de mondes supérieurs et nous donnent accès, si nous savons écouter leurs messages, à notre dimension céleste.
Pour aller plus loin
Wilczkowski C., L’homme et le Zodiaque, Le Griffon d’Or, 1947.
Wagner-Vriz N., Le zodiaque l’art des signes, Du May, 1995.
Ptolémée C., Le livre unique de l’astrologie, Nil, 2000.
Gravelaine J. de, Dieux et héros du zodiaque, Laffont, 1996.
Desroches Noblecourt C. – «Le zodiaque de pharaon», Archeologia n°292, juillet-août 1993.
Champeaux G. de et Sterckx S., Le monde des symboles, Zodiaque, 1989.
Aurigemma L., Le signe zodiacal du Scorpion, Mouton, 1976.